Nous dirigeons-nous vers la fin des agences bancaires physiques ?
L’implantation des agences bancaires sur le territoire national est un enjeu complexe, pour lequel la France ne fonctionne pas du tout comme ses voisins européens. C’est le résultat d’un rapport publié par la Banque Centrale Européenne : la France fait figure d’exception parmi les nombreuses fermetures d’agences auxquelles on assiste dans les pays de l’Union. Cet état de grâce peut-il durer ?
De moins en moins d’agences ?
Depuis quelques années, on constate un net recul du nombre d’agences bancaires implantées sur le territoire. C’est d’autant plus vrai depuis la crise de 2007-2011, qui a frappé de plein fouet le système bancaire. Or, la France est devenue le pays possédant la meilleure couverture nationale en agences bancaires, après le net recul de l’Espagne en 2012. Si on se fie aux données de 2015 fournies par la BCE, la France possède 37 567 agences bancaires, tandis que l’Allemagne plafonne à 34 045 (malgré son importante population). L’Espagne et l’Italie tournent autour de 31 000 agences, et le Royaume-Uni arrive en queue de peloton avec seulement 10 760 agences.
Et pour l’instant, l’Hexagone tient la tête haute puisque son rythme de fermetures d’agences reste très en deçà de ses voisins européens. Quand ce dernier se limite à -2,2% pour la France entre 2011 et 2015, il monte à 10 en Allemagne et au Royaume-Uni, et même à -22% en Allemagne ou -33% aux Pays-Bas sur la même période ! Les principaux établissements européens ont été nombreux à annoncer une modification de leur implantation physique pour mieux coller aux exigences du marché.
Des plans de fermeture qui s’imposent
Alors que l’Europe est frappée par une vague de chômage important qui peine à se résorber, les annonces de fermetures massives ne sont jamais accueillies avec enthousiasme … c’est le moins qu’on puisse dire. Cependant, la rentabilité des agences est sérieusement malmenée par la transition numérique que le secteur financier a amorcé depuis déjà quelques décennies. Les clients demandent toujours plus de services dématérialisés, accessibles au creux de leur main : ils ne sont plus que 20% à fréquenter mensuellement leur agence, chiffre qui tombe à 13% pour les 18-24 ans. De plus, la politique de taux bas pratiquée actuellement par la BCE mine fortement la capacité des agences à dégager des marges comfortables : on estime que les revenus liés aux dépôts ont été tronqués de 15 à 20%.
Un certain nombre de fermetures ont donc été annoncées, même dans l’Hexagone : la Société Générale, propriétaire notamment de la banque en ligne Boursorama, va fermer 400 agences dans les 3 années à venir. Et dans le même laps de temps, LCL va fermer près de 250 agences, BNP Paribas va en clore 200, et BPCE va se séparer de 400 agences sur le territoire.
Petite exception dans le paysage : les banques mutualistes, une spécificité française, vont maintenir autant qu’elles le peuvent leurs agences régionales. En effet, la relation de confiance que ces banques ont mis en place localement avec leur clientèle est précieuse, et fermer une agence pourrait irrémédiablement signer la perte d’une partie importante de la clientèle. La sécurité, la proximité, l’expertise et le sens du dialogue sont toujours fortement mis en valeur par les consommateurs : une agence bancaire physique est donc une sorte de dépense marketing supplémentaire.
Comment la situation va-t-elle évoluer ?
Entre la conjoncture économique défavorable et le choix de certaines banques de maintenir leurs réseaux d’agences malgré tout, on ne comprend pas bien comment les établissements bancaires vont réussir à équilibrer l’équation. Il faudra trouver un point d’équilibre entre présence physique et développement digital. La réponse est peut-être à trouver dans le secteur du retail, où la boutique est désormais une extension physique de l’expérience digitale. Cette interpénétration pourra-t-elle être reproduite dans le secteur bancaire ? Fera-t-elle sens ?